Retour des quais

Après presque une heure de périple sans histoire à travers les rues de petites banlieues endormies puis les bois et enfin la forêt profonde de Fontainebleau, les quatre garous, ralentis par les blessés arriva enfin dans le périmètre du caern. C’était un endroit particulier, pas plus sombre ou plus sinistre que le reste de la forêt, mais il régnait une ambiance qui semblait avertir chaque être vivant qui les traversaient que ces lieux étaient sous la protection d’une puissance bienveillante mais néanmoins dangereuses.
D’autres garous du caern de la Feuille Morte avaient repéré et observaient de loin ces nouveaux arrivants. Un lupus ouvrait la marche, suivi de trois homid dont un avait plutôt l’air en mauvaise posture, porté par un de ses compagnons. Le petit groupe avança jusqu’à l’imposant dolmen qui surplombait le caern, le conseil des anciens. Mais contrairement aux espérance de l’Enfant de Gaïa il n’y avait là aucun ancien.
Précédant Crocs-de-Lumière qui ouvrait la marche, Danse-avec-le-Vent déposa Dereck, le Fils de Fenris. Bien qu’inconscient, il était agité. Un esprit devait très certainement le visiter en rêve.
Danse-avec-le-Vent s'écria alors:

"Où est la théurge ? Où est Grand-mère ? On a besoin d’elle immédiatement, allez la chercher. Vite !"

"Du calme les enfants, la cavalerie arrive !..."

Grand-mère Daliah arriva du plus vite qu’elle put sur les lieux, suivie de Nick le Wendigos. Quelques garous avaient formés un cercle autour du petit groupe de retour de la ville. La théurge les fit s’écarter, évidemment il n’y avait qu’elle qui était en mesure de procurer des soins ici. Encore quelque chose qu’il allait falloir arranger au plus vite.
Daliah jeta un œil à Maeve puis à Dereck, qui avait été posé sur le sol.

"Ouh ! ils sont dans un bel état ces deux là… "

Danse-avec-le-Vent et le lupus qui l’accompagnait avaient l’air en forme. Un jus noirâtre dégoulinait encore de la gueule de se dernier. Daliah passa un doigt sur la substance visqueuse qu’elle inspecta.

"Hmm moui du jus de Ver… un bon cru en plus… "

Il faudrait demander de l'aide à Ours le guerisseur. En même temps qu’elle s’agenouillait à côté du Fils de Fenris, inspectait et nettoyait sa blessure à l’aide d’un cataplasme de plante ; Grand-mère demanda à Maeve :

" Ca va aller vous ? Vous avez l'air de bien resister. Excusez-moi si je m’occupe d’abord de ce petit mais son état est déjà avancé, enfin il s’en tirera sans problème je pense. Par les esprits, quelqu’un peut-il m’expliquer ce qu’il s’est passé ? "

==>La grotte aux Esprits

Dans sa course folle, rendue encore plus amusante par les images qu'il se faisait défiler dans l'esprit, Nick avait involontairement poussé son corps à se métamorphoser. Le Théurge était si concentré sur l'idée qu'il était un loup qui courait qu'il provoqua sa transformation jusqu'au stade de Lupus. La transformation avait été, en quelque sorte, fluide, pas de vraies douleurs mais une impression de picotement sur tout le corps, la sensation était très étrange, comme si sa peau le grattait depuis l'intérieur, un peu comme si son sang le chatouillait.

Et c'est comme ça que, devant le rassemblement des blessés, de Daliah et d'autres Garous, il se retrouva dans le corps d'un grand loup entièrement blanc, sauf sur la truffe, les coussinets et les griffes. Le côté inattentif quasi-pathologique de Nick fit qu'il ne remarqua pas que, collé derrière la Shaman, il était occupé à se gratter énergiquement le flanc droit comme un chien couvert de puces. Il essayait de chasser ces affreux picotements, et comme leur intensité diminuait, il perséverait et se grattait encore.

Il finit enfin par s'arrêter et se mit à bailler. C'est en s'entendant couiner qu'il comprit qu'il avait fait quelque chose... cherchant à se regarder, il se mit à poursuivre sa queue. Il s'amusa une petite minute à ce jeu idiot avant de se dire qu'il n'était pas seul... Il tournait la tête dans tous les sens, principalement vers le Garou allongé qui recevait les soins de Daliah.

Maeve souffrait en silence. Son épaule la faisait extrêmement souffrir, et les quelques images d’elle que lui avaient renvoyés les vitrines des magasins la mettaient tout autant à mal. Etait-ce elle, cette créature vaguement humanoïde pleine de poils ? Depuis quand était-elle si grande, si musclée, si poilue ? Elle espérait vraiment qu’elle réussirait à retrouver sa forme humaine…
Sa tante lui avait dit quelque chose à propos de ça, mais la pensée de sa tante était encore plus douloureuse que le poison sur son épaule et elle préférait donc se concentrer pour ne pas tomber.

Ils traversèrent la ville avant d’attendre la forêt puis ce lieu étrange dont l’atmosphère l’apaisait. La jeune Fianna en ignorait l’existence. Mais il y avait tellement de choses qu’elle ignorait…
Lorsque Danse-avec-le-vent s’arrêta, elle s’écroula à genou, épuisée. Il y avait des mouvements autour d’elle, des cris, des appels, mais rien n’accrochait son regard qui se promenait de roches en arbres et de lupus en homidés. Elle était perdue et blessée.

Alors qu’elle sentait que son esprit se déconnectait de la réalité, une voix sembla s’adresser à elle. La jeune fille banda sa volonté et se tourna vers Dahlia, les yeux plissés sous l’effort.
Bon. En gros, elle n’allait pas avoir droit à la primauté des soins.

« Je… sais pas… marchais puis… un truc m’a attaqué… j’ai senti qu’c’était pas bon… puis l’évanoui est arrivé puis… les deux autres… je sais rien, je comprends rien… »

Danse-avec-le-Vent regardait la scène un peu à l’écart. D’un côté il se sentait coupable de n’être pas arrivé avant que les deux jeunes ne soient blessés, mais de l’autre il était tout de même bien content d’avoir apporté deux nouveaux garous qui grossiraient les rangs du caern… s’ils s’en sortaient. Heureusement Grand-mère n’avait pas l’air trop inquiète sur ce point.

"Ils ont été attaqués par un fomor Grand-mère, je n’ai rien pu faire je suis arrivé trop tard. Cependant s’il y a de saletés de ce genre qui se baladent en ville, vous savez tout autant que moi ce que ça signifie…"

L’enfant de Gaïa n’avait rien et il préféra s’éloigner un peu, laissant la théurge prodiguer ses soins à Dereck. Il jeta un coup d’œil discret à la boule de poil blancs toute excitée qui tournait en rond de façon pataude et presque pathétique. Il faudrait vraiment du temps pour que tous ces petits loups deviennent des guerriers…

"Hmm oui je vois…"

Daliah n’en dis pas plus, elle préférait se concentrer sur les blessures plutôt que sur une conversation qui pouvait attendre un peu.
La théurge en avait presque fini avec la blessure du jeune Fils de Fenris. Une fois le corps débarrassé du poison, ses compétences naturelles de régénération devraient faire le reste sans qu’il n’ait même à subir de séquelles. Il restait à Grand-mère Daliah la partie la plus délicate mais aussi la plus passionnante de la façon dont un shaman garou pratique la médecine : l’invocation d’un esprit guérisseur.
Théurge de renom et ce depuis de longue années, Grand-mère Daliah avait noué des liens avec de nombreux habitants du monde umbral. Et de tous les guérisseurs aucun ne surpassait Ours. Elle se concentra un instant en essayant de faire abstraction du jeune fou qui tournait en bourrique dans son dos.
La shaman joignit ses mains, ferma les yeux et prononça quelques parolesincompréhensibles pour un non-initié.
Gaïa soit louée, elle n’eut pas à attendre bien à attendre bien longtemps pour voir apparaître le spectre du grand Ours, guerrier sage et toujours fidèle et bienveillant envers les siens.
Le corps de la vieille, toujours accroupie se couvrit alors d’une forme intangible et brumeuse, l’esprit d’Ours l’entourait et lui prêtait ses dons. C’est là que réside la force des théurges, leur corps est peut être plus faible que celui d’un arhoun belliqueux mais ils connaissent les bonnes personnes pour leur prêter main forte quand le besoin s’en fait sentir.
Ainsi habitée par le puissant esprit guérisseur, Grand-mère Daliah plaqua ses mains, une sur le front, l’autre sur la jambe blessée de Dereck. Puis elle se leva, avec l’aisance d’un fantôme et pratiqua les mêmes soins sur la blessure à l’épaule de la Fianna. Le soin lui fit d'ailleur recouvrir sa forme humaine.

L’effet de la médecine d’Ours devrait se faire rapidement sentir et l’esprit prit congé de la théurge, de la même façon qu’il était apparu, et ce dès qu’il jugea que sa présence n’était plus nécessaire.

La médecine fit effet. Maeve ne comprit pas trop comment, mais sa blessure sembla se résorber. Un flash la parcourue : une petite fille qu’elle savait être sa tante et un grand ours dans un paysage boisé. Mais l’image disparue de son esprit alors que son corps retrouvait forme humaine.

Cette transformation la rassura, et avec la progressive disparition de la douleur elle retrouva un peu ses esprits. Son regard perdit son air vague, sa mâchoire pendante se resserra et elle songea même à essuyer le fil de bave qui en dégoulinait. Une fois avoir vérifié que ce qui restait de ses vêtements lui assurait un minimum de décence, elle se releva et observa le lieu où on l’avait emmené. Fontainebleau… En pleine forêt. Et encerclée par ce qui était visiblement des Loup-Garous.

Bien sûr, Maeve connaissait leur existence, bien que le seul qu’elle ait connu en tant que tel soit sa très chère tante. Mais elle ne s’était jamais interrogée sur sa propre nature… Et Creena l’avait toujours encouragée à se voir comme « Parente ». Elle ne savait pas si elle devait être ravie ou triste. Pour l’instant, elle songeait surtout à comprendre ce qui s’était passé.

* Oh my goddess… What have I gotten into ? *

L’irlandaise jeta un autre regard circulaire. Quelque chose au fond d’elle lui dit qu’elle n’était qu’au début de ses surprises, et qu’elles ne seraient pas toutes aussi agréables qu’une grand-mère capable de faire n’importe quoi par apposition des mains.

« Hum, heu… Merci de m’avoir soignée… et, heu, vous, merci de m’avoir sauvée… Heu… C’est un caern, c’est ça ? Et vous vous êtes la… heu, mince… la shaman du caern, quelque chose comme ça ? » Demanda-t-elle à Grand-Mère, en forçant inconsciemment sur son accent irlandais, un réflexe qui ressortait dès qu’elle voulait bien se faire voir.

Nick se calma aussitôt qu'il vit qu'il se passait quelque chose "d'inhabituel" près de lui : la vieille Garou avait demandé l'aide d'un esprit pour guérir les blessés et ça, même pour lui qui était encore jeune et surexcité -quoique qu'il était presque continuellement surexcité- c'était impressionnant, d'autant plus qu'il était Théurge et qu'il savait, d'après les contes qui hantaient ses souvenirs d'enfant, que les Esprits, c'était son affaire. Ou qu'en tout cas, ça le deviendrait. Alors donc, il avait tenu à ne pas rater une miette de ce qui se passait. Il fut un peu déçu, ce n'était pas aussi spectaculaire que ce qu'il avait imaginé. Mais ça marchait plutôt bien, les plaies se refermaient et la rouquine put se relever sans problèmes. Ah, et en plus, elle était jolie sans les poils et la carrure de catcheur...

Bien vite cependant, Nick commença à s'ennuyer : bon, on avait ramené des blessés, on les avait soignés, et c'était finit... Le Louveteau entreprit de se gratter un peu, de baîller à nouveau puis il se mit sur le dos et se roula par terre en grognant joyeusement. Il n'y réfléchit que brièvement mais il trouvait qu'il s'amusait d'un rien sous cette forme.

Après être resté allonger quelques instants à regarder la lune et les étoiles, il se releva et se mit à renifler les "pistes" dans l'herbe, éternuant quand un petit insecte faillit se faire happer dans une de ses narines. En relevant la tête, il se retrouva face à un autre Lupus, plus grand que lui, brun, avec une mâchoire de monstre. Il lui tira la langue gaiement, remuant la queue. Et il se retint de poursuivre à nouveau son pauvre appendice, le fait d'avoir une telle chose accrochée sur le corps le surprennait encore un peu.

"Bonsoir ! Alors, vous avez été attaqués sur les quais ? Ca ressemblait à quoi ? Vous l'avez tués comment ?"

Il avait trouvé une nouvelle source d'amusement : le récit du combat des nouveaux venus. Il regrettait un peu, maintenant qu'il se sentait bien, de ne pas avoir pus tester ses capacités...

Il se senti tombé longtemps, un engourdissement dans les jambes qui commençait à gagner tout son corps, comme si on nageait dans une eau glacée au sein d'une obscuritée totale. Il y avait vraiment une chose mauvaise en lui, une chose qui ne venait pas de lui, ni de rien qui ne semble naturel, quelquechose qui ne devrai pas exister, une abbération contre-nature.

On le portait, il le sait, qui ? vers ou ? Aucune idée de tout cela... La conscience n'est que poussière dans ses cas là... mais la colère reste... L'échec cuisant contre une créature inconnu dans... un corps inconnu, plus un rêve qu'une hallucination, il révait forcement c'est pas possible se genre de changement chez un être humain.

Une chaleur, la même que dans la grotte, non... sensiblement différentes mais flagrante de similitude, une fourrure douce sur les points les plus douloureux de son corps... La conscience qui reviens... Des yeux qui s'ouvre et une scène impossible encore une fois, une bête poilu devant lui qui semble l'avoir soignée, d'autre autour... des hommes aussi...

"Qui êtes vous ?"

Crocs-de-Lumière observait attentivement la scène, une théurge, ils l'appelaient ainsi, avait prodigué des soins aux blessés du combat contre le fomor.

Elle faisait appel aux esprit et à Gaia pour demander une guérison rapide. Il se rapprocha d'elle quelque peu pour la renifler, elle avait une odeur très rassurante, le genre d'odeur qui donne confiance. Crocs-de-Lumière pouvait sentir cette présence apaisante, toutefois il fut alerté par autre chose.

Un lupus blanc, blanc comme la neige, semblant être excité comme une puce, se rapprocha de Crocs-de-Lumière. Il était bien plus bas que lui et sa mâchoire ne pouvait pas rivaliser avec celle de l'ancien chef de meute. Le lupus blanc entama la conversation en demandant des renseignements sur le combat l'ayant opposé au fomor. Crocs-de-Lumière renifla ce nouveau compagnon et lui répondit:

"La créature que j'ai tué? Ca ressemblait à un homme, enfin de ce que j'en sais sur eux, mais avec pleins de boutons et une longue langue... Comment je l'ai tué? Ben comme on tue n'importe quel proie, en attaquant la gorge... Mais dis-moi, tu n'es pas comme moi toi non plus, hein? Tu es un... Humain?"

Nick s'était assis pour écouter la réponse du Lupus, sa queue ne remuait plus autant mais on le sentait toujours de bonne humeur. Il fut un peu surpris du geste du Garou, cette façon de le renifler dès le début, mais Nick se dit que c'était une façon de... une façon de faire chez les loups, aussi imita-t-il son interlocuteur, avec un air hésitant. Il était bien plus imposant que lui ce Lupus brun, Nick n'avait que son épais pelage blanc pour dissimuler sa musculature fine. Et son museau était plus fin et allongé...

Le jeune Garou fut un peu déçu d'être percé à jour aussi vite mais peut-être qu'en tant que Changeur de Forme d'origine humaine, il avait une odeur particulière...

"Oui, je suis un Humain... Mais si tu me demandes ça, toi tu dois être un loup alors ? C'est chouette ça, tu sais, il n'y a pas si longtemps encore je ne m'imaginais pas discuter avec quelqu'un comme toi... Je vais avoir plein de questions à te poser ! Euh... si ça ne te dérange pas bien sûr... Mais, tu dis que tu as sauté à la gorge de ce truc ? Hé, j'aurais bien voulu y être moi aussi ! Par contre, pustules et longue langue... Enfin, le combat a été difficile ? Deux blessés quand même..."

Crocs-de-Lumière semblait interessé par cet humain, il essayait d'agir comme un loup, mais son comportement était très instinctif. Tout homme l'aurait pris pour un véritable loup, mais le Lupus ne pouvait être dupe, ces façons de tourner en rond, d'être surpris lorsqu'il se faisait renifler, tout cela prouvait qu'il était humain et qu'il découvrait une nouvelle façon d'être.

D'un pas lourd, il fit le tour du loup blanc, afin d'admirer sa foururre, il ne savait pas vraiment pourquoi, mais ce garou, il l'appréciait... Sûrement un trait de la descendance génétique de son géniteur...

"Oui, je suis un loup... Ce fomor n'était qu'une proie déjà affaiblie, rien de très dangereux... Le combat a été très difficile car, vous les humains, vous ne savez pas chasser à ce que j'ai compris, enfin si vous voulez, je pourrais vous apprendre...En tout cas, je suis rassuré de voir que tous les humains ne sont pas corrompus par le Ver..."

Nick était un peu tendu, il ne savait pas si ce gros Lupus était aussi inexpérimenté que lui ou s'il s'agissait d'un Garou qui en avait déjà vu quelques-unes, alors quand il le vit lui tourner autour il se raidit. Mais d'un autre côté, l'odeur de cet inconnu lui était agréable, elle le mettait en confiance. Peut-être un morceau de mémoire collective...

Pendant que l'inconnu s'expliquait, Nick ressentit le besoin de... jouer avec lui. Il se retint bien entendu de lui sauter sur le dos pour lui mordiller le cou mais il pensait que ça pourrait être amusant... sa queue se remit à bouger en vitesse.

"Hum... Tu dois avoir raison, c'est vrai que je ne sais pas vraiment me battre... mais ce n'est pas l'envie qui me manque ! Sûr que si on a l'occasion, j'adorerais que tu me montres comment chasser ! Mais toi aussi, ça doit te faire bizarre, non ? Tous ces humains... On agit pas de la même façon... Et... merci pour le compliment... "

Crocs-de-Lumière sentait de la crainte chez ce jeune loup. Il le caressa du bout du museau, comme pour le rassurer:

"N'aie crainte... J'ai un aspect effrayant, mais je n'en suis pas moins ton frère désormais. Je défendrai cette tribu comme j'ai défendu ma meute autrefois."

Puis il prit un air plus sérieux, les babines se retroussant légèrement:

"J'ai vu ce que les humains avaient fait, j'ai vu ce que vous appelez "villes", tout ceci n'est que le résultat du travail du Ver. Sache que je serai sans pitié envers ceux qui portent atteinte à Gaïa, humains ou non..."

Le lupus voulait mettre les choses au clair dès le début, il ne portait pas les Hommes dans son coeur, néanmoins, peut-être qu'avec le temps, cela changera...

Nick frissonna légèrement, il agissait par moment comme un loup mais c'était uniquement parce qu'un instinct s'était éveillé dans son esprit, il ne connaissait pas toutes les subtilités du langage corporel lupin et la réaction de... qui donc ? Pour le calmer n'eut pas tout de suite l'effet escompté, ce fut après qu'il soupira de soulagement. Ce loup avait raison : ils étaient frères, des Garous...

Nick baissa la tête en entendant les dernières paroles du Lupus, il s'en voulait, quelques part au fond de lui il se disait qu'avant son Premier Changement, il n'avait pas fait assez pour l'environnement, qu'il aurait dû pousser ses amis à soutenir des organismes écologiques, signer des pétitions... et puis, toutes ces histoires sur les loups qui revennaient en France et que les éleveurs voulaient tuer, les pots de miel plein de verre pilé laissé dans la montagne pour tuer les ours qui soit-disant massacrait les troupeaux... Il redressa le museau.

"Je crois que je peux comprendre... en partie du moins... c'est vrai que les Humains ne sont pas la meilleure chose qui existe... quelques-uns sont encore bons quand même, tu sais..."

Il secoua la tête, il n'avait pas envie de parler de choses trop noires."

"Au fait, comment est-ce que tu t'appelles ? Euh... enfin, si..."

Il fit une mimique étrange, pour montrer sa gêne : il ne savait pas si les loups se donnaient des noms entres eux.

Crocs-de-Lumière vit la gène de son compère. Il se rapprocha un peu plus, voyant la gêne de ce dernier. Finalement les humains n'étaient pas tous irrécupérables, certains rejoindraient leur côté, il y croyait:

"Votre espèce a réussi tant de miracles m'a t'on dit, mais ils ont commis l'erreur de défier Gaïa, les coupables seront punis... "

Le fait que Nick lui confirme que tous n'étaient pas mauvais, le rassura énormément. Il leur suffisait peut-être juste d'ouvrir les yeux, finalement, de se rendre compte de leurs erreurs...

"Mon nom? Ma meute m'appelait, Crocs-de-Lumière, en référence à mes canines."

Il ouvrit alors la gueule, pour montrer deux grosses canines, brillant telles un objet métallique reflétant les rayons du soleil.

"Et toi? C'est quoi ton nom?"

Le jeune Nick réussit finalement à se détendre, le grand Lupus brun semblait accepter qu'il puisse exister des exceptions et cela rassurait le Lycanthrope, il n'avait pas en face de lui quelqu'un à l'esprit obtu, même s'il n'avait que vaguement imaginé ce cas de figure. Ce qui avait le plus calmé Nick c'était l'idée que Crocs-de-Lumière ne semblait pas lui en vouloir d'être un Homidé, tout juste devait-il trouver ça un peu dommage que de ne pas avoir un autre loup en face de lui. C'était compréhensible... si tant est que ce fut son sentiment, Nick ne pouvait faire que des suppositions...

Lorsque ce fut son tour de se présenter, Nick se sentit à nouveau un peu minable de ne pas avoir un nom de type "Rêve-Dans-Les-Bois", mais il savait que tous les Garous en recevait un lors du Rite de Passage... Il était impatient de subir ce Rite et de connaître son nouveau nom...

"Moi c'est... Nick..."

Son prénom ressemblait à un grognement sans signification, avec une sonorité particulière. Subitement, le Wendigo ressentit le besoin de se défouler le traverser, il se coucha sur le sol, agitant la queue, puis se redressa d'un bond sur ses pattes et commença à se dandiner en grognant et couinant.

"Dis, tu crois qu'on a un peu de temps pour... je sais pas, par exemple, tu pourrais me montrer comme on mords une proie à la gorge ?"

Il ne le disait pas clairement, mais le Théurge espérait une séance de jeux avec le Lupus, il avait envie de lui sauter dessus, encore. Un tout jeune instinct qui se manifestait...

La vieille théurge était fascinée par l'étrange conversation que menaient ces deux petits loups. Ce n'était décidément pas pour rien que l'on surnommait Daliah "Grand-mère". Elle adorait tous les garous qui l'entouraient et qui formait sa famille. Famille avec des enfants parfois difficiles, perdus, déprimés, ou rebelles. Quoiqu'il en était, Grand-mère les aimait tous, sans distinction. Ainsi elle constata avec joie que Nick avait l’air de se faire sans mal à sa nouvelle nature.

"Et bien au moins il y en a qui ont l'air de s'amuser, si vous voulez aller faire le tour du Caern pour commencer à prendre vos marques, je vous conseille de le faire maintenant. Après on commencera une assemblée avec les anciens."

Pour un peu elle leur aurait offert des barres chocolatées comme dans la publicité. Daliah se demanda si elle ne devenait pas un peu gâteuse avec l'âge.
Tellement absorbée par ses pensées elle faillit ne pas faire attention à la question du Fils de Fenris qui venait de s'éveiller.

"Vous êtes ici en lieu sûr, détendez-vous tout ce passera bien. Je suis garou tout comme vous, et comme tout le monde ici. Garou, vous savez cela signifie? Il paraît que vous avez déjà connu votre Premier Changement."

Dereck s'essayat a garder son calme.

"- Je vois bien que vous n'avez pas l'air aggressif et vu l'état de ma cheville, dit-il en la désignant du menton. Je pense que vous devez m'avoir aider mais... vous connaissez la fôret noire ?"

Le jeune garçon pris une pause dans ses paroles se remémorrant la.

"- J'ai changé oui... Ou alors j'ai découvert une autre part de moi même... Ce qu'elle signifie, je ne sait pas... je l'apprendrais je suppose à ma manière. MA mère m'a parler des guerriers gardien de la forêt noir comme d'une légende... Vous êtes vraiment là."

Nick, il s'appelait Nick. Quel nom étrange! Cela devait avoir une signification qu'il ne saisissait pas, en humain. Il ne voulait pas se rajouter des interrogations là où le sujet était déjà assez brumeux pour lui... Il apprendrait avec le temps, car de part leur nature complexe, il ne fallait pas espérer comprendre les humains en quelques mois, non ce serait le travail de toute une vie.

Nick lui demanda alors s'il pouvait lui apprendre à mordre à la gorge. La posture du tout jeune louveteau, montrait qu'il souhaitait s'amuser, une gestuelle dont il ne se rendait pas compte mais qui était aussi clair pour Crocs-de-Lumière que de l'eau de roche.

Finalement, il l'aimait bien ce... Nick... Il s'apprendraient mutellement beaucoup de choses ensemble, pensait le Lupus.

La Théurge les coupa en leur autorisant à visiter le Caern. Crocs-de-Lumière souhaitait ardemment connaître ce nouveau territoire, qui s'avérait être son nouveau "terrier".

"Tu viens, Nick...? On va visiter, j'en profiterai pour t'expliquer comment on tue en un coup..."

Crocs-de-Lumière venait de claquer la mâchoire pour expliquer le geste.

Sous la fourrure blanche, le cerveau de Nick le Wendigo tournait à un régime moins soutenu que d'habitude, il ne se posait plus trop de questions sur sa condition récemment révelée. Il avait autre chose à faire que de s'inquiéter, il était un Changeur de Forme et quoiqu'il fasse, il ne pourrait pas aller contre ça. Il devait faire comme suggéré : voir le côté positif de la situation. Et c'étaitt ce qu'il faisait...

Il avait l'esprit dégagé. Il était un Garou, un puissant guerrier mystique -enfin, il le deviendrait- engagé dans une guerre... assez mal partie, sans compter d'autres choses assez sombres mais là, en ce moment, il était redevenu un gamin dont les rêves se réalisaient : il pouvait se changer en loup, en monstre capable de déchirer un homme en deux à mains nues... de quoi faire baisser sa matûrité de plusieurs crans, aidé par le fait qu'il était en train de se faire un nouvel ami quadrupède, encore une chose qui a normalement sa place dans les rêves des gosses. Et cette autre partie de lui, toute jeune, qui le poussait à prendre les choses comme un jeu... Il ne put résister aux propositions de la vieille Garou et de Crocs-de-Lumière plus d'un quart de seconde.

"D'accord, je te suis ! Je me demande quelle taille fait cet endroit..."

Il regarda le geste du Lupus sans s'effrayer, il savait que le loup ne lui ferait rien, c'était pour lui montrer des "trucs". Et Nick imita son comparse maladroitement et sans trop de conviction, il avait peur de se faire mal en étant trop brusque, il n'avait peut-être pas une gueule aussi large que Crocs-de-Lumière mais ses quenottes n'en étaient pas moins de jolis crocs tout blancs...

Les yeux de la tête de loup de Grand-mère se plissèrent :

"Les guerriers de la Forêt Noire ? Vous êtes à peu près dans le vrai jeune homme à la différence près que vous êtes à Fontainebleau…"

La vieille théurge se tourna ensuite vers la rouquine – une Fianna sans aucun doute, à en juger par l’accent très british et la couleur de cheveux. Décidément cette tribu était assez bien représenté dans la région.

"Oui c’est tout à fait à ça, vous êtes dans au Caern de la Feuille Morte. Mon nom est Daliah, mais tout le monde ici m’appelle ‘Grand-mère’, vous comprendrez pourquoi, et je suis effectivement la shaman est l’autorité principale de ces lieux…"

Grand-mère considéra ses nouvelles recrues. Ces deux-là avaient déjà vécu un combat et s’en étaient sorti sans trop de casse, c’était un baptême du feu qui avait le mérite de leur faire comprendre d’emblée dans quelle genre de galère ce Fils de Fenris et cette Fianna venaient de tomber. Leur aide ne serait pas de trop.
Ils avaient l’air d’aller mieux et semblaient plus au fait des événements que les autres louveteaux que venait d’accueillir le Caern. Au fond ça arrangeait Daliah, ce serait toujours ça de moins à expliquer.
Mais alors que son regard croisait celui de la jeune Fianna, un souvenir revint à l’Ancienne. Il inclina légèrement la tête.

" Jeune fille vous me rappelez quelqu’un, on ne serait pas déjà rencontré, ou alors un de vos parents ? Comment vous appelez-vous ? "

Maeve avait terminé de rassembler ses esprits. Elle était donc dans un caern, celui de la Feuille Morte. Ses souvenirs en gardaient trace et elle en conclu donc que feu sa tante le connaissait, ou en tout cas en avait entendu parler. Elle n’avait toujours pas compris comment ce processus d’avoir les souvenirs d’une autre personne marchait, mais ça lui paraissait profondément logique.
Après, à ce qu’elle savait de l’histoire de cette dernière – c'est-à-dire pas grand-chose – cette dernière constituait un modèle unique de Fianna solitaire, et qui donc ne devait pas fréquenter assidûment un caern. Sûrement même avait-elle choisi Paris pour son absence de caern proche et donc sa relative tranquillité.
L’idée qu’elle allait devoir se battre, comme plutôt, pour un combat qu’on lui avait dit perdu d’avance, ne l’effrayait pas. Elle n’avait plus de famille connue, ses amitiés et ses études seraient sûrement compromises par sa nouvelle nature et de toute façon on ne lui laisserait certainement pas le choix : elle y était, elle devrait y rester.

La jeune Fiann attendit poliment que la vieille Théurge reporte son attention sur elle. Il y avait visiblement eu un arrivage récent de nouveau… Le lupus qui les avait « sauvés » parti avec un grand loup blanc tout foufou, l’homidé qui était venu l’aider semblait en savoir moins qu’elle et être un peu ailleurs. Elle tenta de reconnaître leur tribu du peu qu’elle savait d’elles, mais peine perdue. Si ses connaissances théoriques étaient toutes à fait honorables, son expérience pratique avoisinait le néant. Elle savait que les Fianna étaient roux et d’outre-manche, point.

Grand-mère se tourna vers elle. L’irlandaise s’inclina lorsqu’elle apprit qu’elle faisait face à « l’autorité principale » des lieux. Encore un de ces réflexes qu’elle n’avait pas la veille…

« Je suis très honorée de faire votre rencontre et vous remercie de m’avoir sauvée. »

La remarque de l’Enfant de Gaïa ne la surprit pas, la remplissant même d’une certaine fierté. Elle était fière de son ascendance, même si celle-ci…

« Je m’appelle Maeve Conway. Mais vous avez peut-être connu ma tante, Creena Conway, qu’on appelait Credna. Malheureusement, elle est… hier soir… »

Une grosse boule se forma au centre de sa gorge. Elle n’arrivait plus à parler, et de petites larmes lui piquèrent les yeux.

« Elle est… elle a été… »

L’image de sa tante à moitié morte et expirant dans ses bras avait été occultée par son esprit et revint la frapper avec le choc d’un coup de poing.

« Elle a été abattue hier soir. C’est là que je me suis changée, mais c’était trop tard. » Réussit-elle à articuler en fixant ses pieds. Si elle se souvenait bien, les Fianna faisaient la fête pour célébrer un deuil. Elle avait plutôt envie de pleurer en hurlant sa douleur, mais une bonne Guiness n’aurait pas non plus été de refus.

Grand-mère prit la jeune Maeve sous son bras comme elle l’avait fait quelques instants auparavant avec Nick. Elle tapait affectueusement l’épaule de la Fianna du bout de ses pattes.

"Allons vous n’allez pas vous mettre dans un état pareil…"

Ils étaient bien émotifs ces louveteaux. Bah ! Ils avaient toute la vie pour s’endurcir. Et puis au fond Daliah préférait encore avoir affaire à des cœurs d’artichauts plutôt qu’à des brutes sanguinaires qui éliminent quiconque a une tête qui leur revient pas.
La vielle louve raconta alors ce qui arrive ceux qui dont l’enveloppe charnelle meure.

"Le corps de Creena n’était peut-être pas beau à voir mais son esprit est revenu à Gaïa lui faisant bénéficier de l’expérience de sa vie. Ainsi vont les choses, ni les larmes ni la colère n’y change quelque chose…"

De l’expérience, ça Creena allait en apporter à Gaïa, après la vie tumultueuse qu’elle avait connue. On dit souvent que le monde est petit. Il l’est encore plus dans la communauté réduite garous, où presque tout le monde se connaît pour peu qu’on ne reste pas dans son coin.
Mais la théurge ne préféra pas approfondir le point de la relation qu’elle avait pu avoir avec la tante de Maeve. Pour l’instant, ils avaient autres choses à faire.
A l'attention de tous, l’ancienne déclara :

"La nuit est déjà bien avancée, il est tant de nous réunir. Plaçons cette assemblée sous le signe de toutes ces nouvelles forces qui viennent de rejoindre nos rangs ainsi que du passage d’une grande louve dans l’Umbra. Festoyons en l’honneur de ce nouveau départ !"

Grand-mère acheva sa déclaration par un long et doux hurlement, le museau levé face aux étoiles, que tous les garous des alentours pourraient entendre.